Les tercios

Publié le par Audeline de Bellecour

Les tercios furent l'unité administrative et tactique de l'infanterie espagnole de 1534 à 1704. Regroupant environ trois mille fantassins professionnels, hautement entraînés et disciplinés, les tercios furent réputés invincibles jusqu'à la bataille de Rocroi. Dans les autres pays, ils furent souvent appelés carrés espagnols.

  • Composition et effectif
Un tercio était constitué par le regroupement de plusieurs banderas ou compagnies de combat, autour d'un état-major permanent d'une trentaine d'hommes, une nouveauté pour l'époque. Cependant le nombre et la composition varia notablement au cours de la longue existence des tercios.

De 1534 à 1567, les premiers tercios basés surtout en Italie comportent dix banderas de 300 hommes, dont deux d'arquebusiers. Les huit unités de piquiers mélangent trois types de soldats :

   * les corseletes, des piqueros (piquiers) équipés d'une demi-armure complète , qui forment les rangs extérieurs de la formation.
   * les piqueros secos, eux aussi des piquiers mais qui n'étaient pourvu que de quelques pièces d'armure et parfois de petits boucliers ronds, les rodelas, qui se tiennent au milieu du carré.
   * les espingarderos (arquebusiers)

Les deux banderas d'arquebusiers ne compte que des piqueros secos et des espingarderos, les premiers étant souvent remplacés par des hallebardiers, plus mobiles. En 1567, avant son départ pour les Flandres, le duc d'Albe introduit quelques mousquetaires, au sein des banderas, pour pouvoir percer les plus épaisses des armures.

Toutes les banderas, ont aussi un état-major de onze hommes, il comprend, le capitaine et son page, un alférez, un sergent, un abanderado ou enseigne, trois musiciens, un fourier, un chapelain et un barbier. Le corps de la troupe est divisé en escadres de 25 soldats, mené par un vétéran, le cabo. L'escadre se divisait elle même en camaradas de 6 à 12 hommmes, conduite elle aussi par un vétéran. En théorie, un tercio de cette époque comprend donc : 147 officiers, 1080 piquiers avec corselets, 400 piquiers légers, 1220 arquebusiers et 190 mousquetaires. Dans la pratique, les effectifs sont plus réduits du fait des désertions et des pertes, et il y a une tendance à augmenter le nombre de tireurs, donc la puissance de feu. Les banderas ont souvent un effectif de 150 ou même 100 hommes.

En 1568, une première réforme, intervient sur les unités présentes en Flandres, avec le passage à douze banderas mais seulement de 250 hommes. La proportion de piquiers au sein de ces unités est beaucoup plus forte, avec 1110 corselets et 1080 piquiers légers, contre 448 arquebusiers et 230 mousquetaires. La raison de cette augmentation du nombre de piquiers est probablement lié au coût des armes, l'arquebuse coûtant 26 réaux contre 7 pour une pique.

En 1632, une ordonnance royale fixe l'organisation des tercios espagnols à 12 compagnies de 250 hommes et ceux des Flandres et d'Italie, à 15 de 200 hommes. Ces nouvelles banderas, dites d'ordonnance, sont uniformes au sein d'un même tercio ; celle de 250 hommes comprend onze officiers et aides, 90 corseletes, 60 mousquetaires et 89 arquebusiers, et celle de 200, onze officiers et aides, 70 corseletes, 40 mousquetaires et 79 arquebusiers.

Cependant en 1636, le gouverneur des Pays-bas espagnols, organise les tercios espagnols et italiens de l'armée des Flandres sur un autre modèle à treize compagnies de piquiers et deux d'arquebusiers mais, du fait de la grand proportion de mousquetaires dans les banderas de piquiers, ceux ne représentent plus que le tiers de l'effectif théorique. Ces tercios sont censés avoir 759 piquiers, 318 arquebusiers et 1380 mousquetaires. Les tercios provisoires levés dans la péninsule ibérique, sont eux beaucoup moins puissants, avec dix banderas de seulement cent hommes, ils sont aussi constitués de troupes de piètre valeur. Les tercios provinciaux qui les suivent sont plus réussis avec leur douze compagnies de cent hommes et des troupes beaucoup plus motivées.

En 1663, une réforme crée les tercios provinciaux fixes, avec 16 compagnies de 62 hommes, puis 20 de 50. Sur le terrain, les effectifs, là encore sont plus réduits, avec souvent une moyenne autour de 500 hommes.

En 1701 Philippe V fixe l'effectif du tercio à un ou deux bataillon de 650 hommes, de douze compagnies et une compagnie de grenadiers, la compagnie étant composée de 3 officiers, 2 sergents, 10 piquiers, 35 arquebusiers.

  • Equipement et armement

L'arme principale des piquiers est une pique, longue de 25 à 27 palma de mano (envergure de main), soit environ 5,20 mètres. Mais ils possèdent aussi une épée, longue de 4,5 palma, soit 95 centimètres et une dague de 30 à 40 centimètres, pour les corps à corps. Les corseletes ont donc une demi-armure ou corselet qui couvre tout le dessus du corps, ne laissant que les jambes sans réelle protection. Les piqueros secos, eux moins exposés se contentent de pièces d'armure plus simples et moins coûteuses. Lorsque le choc a lieu entre les deux phalanges de piquiers, ce qui n'a pas lieu couramment car les pertes sont alors importantes, les piquiers poussent leur pique de la main gauche par le bout, tout en dirigeant de la main droite vers le visage ou le torse de leur adversaire. Contre la cavalerie, la pique est bloquée contre le pied droit et tenu par la main gauche à environ 45° d'inclinaison, le soldat garde sa main droite libre ce qui lui permet de dégainer son épée s'il a besoin de se défendre. Les troupes embarquées utilisent une pique plus courte, d'environ 3,2 mètres.
arquebusier 1650

Les arquebusiers ne sont protégés que par leur casque, souvent un morion et un broigne en cuir, ou une casaque de tissu ou en peau de buffle, au XVIIe siècle le casque est souvent remplacé par un simple chapeau de feutre. Ils portent une arquebuse avec douze doses de poudre préparées, surnommées les douze apôtres, suspendues sur un baudrier et une réserve supplémentaire de poudre et de balles dans un sac. Pour servir leur arme, ils disposent aussi d'une baguette en bois pour bourrer la charge et une poire contenant la poudre noire fine destinée à l'amorçage. Ils peuvent se défendre au corps à corps eux aussi grâce à l'épée et la dague. L'équipement du mousquetaire comprenait en plus la fourquine qui servait a appuyer sa lourde arme à feu lors du tir. D'abord dotées d'une platine à mèche, les deux armes adopteront progressivement la platine à rouet au début du XVIIe siècle, puis seront tardivement remplacées par le mousquet avec une platine à silex, ou fusil, qui pourvu d'une baïonnette, révolutionne l'art de la guerre et provoque la disparition des tercios.
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